Le salon Eurosatory de cette année – deuxième édition depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la première des grandes expositions de défense et de sécurité ayant lieu depuis le début de la guerre au Proche Orient, sera dominée par ces deux événements, les exigences de l’Ukraine et d’autres pays européens faisant l’objet d’une attention particulière. L’absence des entreprises israéliennes est également remarquée, puisque leur participation a été interdite par les autorités politiques françaises début juin.
Le salon se déroule par ailleurs dans un contexte pré-électoral alors que le président français, Emmanuel Macron, vient de dissoudre l’Assemblée nationale, une semaine seulement avant l’événement, provoquant par là-même des élections anticipées à la suite des mauvais résultats de son parti Renaissance aux élections parlementaires de l’Union européenne.
De nombreuses entreprises présentes à Eurosatory ont placé leurs informations sous embargo ou « à l’abri », au sens propre comme au sens figuré, mais il semble que les programmes d’acquisition et les besoins immédiats seront prioritaires. Les systèmes CUAS, les UAS, les véhicules légers ou à chenilles et les matériels associés (systèmes électroniques ou armements embarqués) – devraient occuper une place prépondérante au Parc des expositions de Villepinte, à Paris, du 17 au 21 juin.
L’année dernière, le salon DSEI (« Defence and Security Equipment International »), qui se tient traditionnellement à Londres, avait présenté une gamme de systèmes CUAS allant des radars aux effecteurs et aux véhicules améliorés, tout comme le salon « World Defence Show », qui a lieu quant à lui en Arabie saoudite.
La mise en œuvre de l’intelligence artificielle (IA) dans les systèmes et les plates-formes devrait également jouer un rôle important à Eurosatory, car plusieurs entreprises annoncent de nouvelles initiatives dans ce domaine ou s’apprêtent à mettre en avant les améliorations apportées à leurs produits grâce à l’inclusion de l’IA ou de capacités IA plus avancées.
Un point sur les programmes et ce que l’on pourra découvrir au Salon
Mercedes-Benz Special Trucks présentera pour la première fois à Eurosatory son camion Zetros à quatre essieux et à transmission intégrale. La famille de véhicules Zetrtos comprendra des variantes à huit, six et quatre roues, et a connu des ventes importantes au cours des 12 derniers mois.
Le 29 mai, le consortium Power Team, composé de Mercedes Benz, General Dynamics Land Systems-Canada (GDLS-Canada), Marshall Canada, Soframe et Manac, s’est officiellement vu attribuer le contrat de modernisation des véhicules logistiques (LVM) du Canada, un contrat de 2,8 milliards de dollars canadiens (1,8 milliard de dollars américains) portant sur 1 500 camions Zetros.
Le premier contrat du projet de modernisation des véhicules logistiques porte sur l’acquisition de plus de 1 000 camions légers et d’environ 500 camions lourds, pour une valeur de 1,5 milliard de dollars canadiens. Un second contrat porte sur le soutien pour une valeur potentielle totale de 1,1 milliard de dollars canadiens sur 25 ans.
En outre, l’Allemagne a fourni des centaines de camions Zetros à l’Ukraine, démontrant ainsi une capacité de combat dans le cadre d’une chaîne d’approvisionnement.
Le programme de mobilité terrestre (LMP) du Royaume-Uni a été suivi avec impatience par l’industrie, bien qu’avec inquiétude. Le programme a connu des hauts et des bas depuis son annonce.
D’une valeur potentielle de plus de 4,8 milliards de livres sterling (6,1 milliards de dollars américains), il prévoit le remplacement de véhicules tels que les véhicules Land Rover, Pinzgauer et Panther de type MRAP, ainsi que les véhicules blindés de transport de troupes à chenilles FV432 Bulldog et les véhicules de défense antiaérienne Stormer.
En ce qui concerne les LMP, les véhicules Bushmaster et Hawkei de Thales sont susceptibles d’être proposés pour répondre respectivement aux besoins de protection moyenne et de mobilité légère des LMP, ainsi que le General Logistic Vehicle de Babcock, lequel est pressenti dans la gamme des véhicules utilitaires.
Le GLV de Babcock sera probablement en lice pour remplacer les véhicules légers de l’armée britannique et le besoin sera pris en compte lors du salon Eurosatory 2024. (Photo : Auteur)
Un autre marché de plusieurs milliards de dollars pourrait faire l’objet d’une bataille pendant le salon, ou du moins inspirer quelques escarmouches : il s’agit de l’expression de besoin A2CS de l’Italie pour 679 VFI chenillés en vue du remplacement de 200 VFI Dardo et de sa flotte de M113.
Les entreprises susceptibles de s’affronter seront Rheinmetall avec son KF41 Lynx, BAE Systems avec son CV90 et General Dynamics European Land Systems (GDELS) avec sa plate-forme Austro-Spanish Cooperative Development (ASCOD) 42.
Le consortium italien CIO (responsable de la fabrication du Dardo) a également publié un aperçu d’une nouvelle plateforme VFI armée d’un canon de 30 mm en septembre 2021 (lequel pourrait être lié à des rapports précédents concernant un Dardo 2 en cours de développement).
BAE Systems pourrait présenter deux CV90 : la dernière version CV90 Mk4 – lequel répond à la demande croissante de VFI – et peut-être le CV90 Mk3 avec un canon de 30 mm, lequel s’illustre sur le champ de bataille en Ukraine, les forces ukrainiennes utilisant ce véhicule contre les chars russes.
La guerre entre la Russie et l’Ukraine a suscité un regain d’intérêt pour les véhicules blindés, y compris les blindés « tueurs de chars » et les chars de combat principaux.
Les gros calibres sortent
Alors que le Royaume-Uni poursuit avec succès l’acquisition de son char Challenger 3, un programme visant à moderniser ses véhicules Challenger 2, l’Espagne et l’Italie cherchent des réponses à moyen terme avec des chars Leopard remis à neuf. Des pays comme la Pologne et l’Ukraine se tournent quant à eux vers des chars Abrams rénovés.
L’Italie est passée de la modernisation de son char C1 Ariete à l’achat de 125 Leopard 2A8. Leonardo a signé un accord avec KNDS pour développer le MGCS, la future génération de plates-formes de véhicules blindés.
Rheinmetall va présenter le nouveau concept Panzerjaeger au salon. (Photo : Rheinmetall)
L’Espagne a également envisagé de moderniser les chars Leopard existants ou d’en acheter d’autres, et il est probable qu’elle rejoigne également le MGCS à l’avenir.
Il est intéressant de noter que le 2 juin, une affiche X (anciennement Twitter) à l’œil aiguisé a noté des véhicules Rheinmetall en mouvement avec « un Kodiak utilisant le modèle du KF-51 et du KF-41 [et] un châssis Leopard 2A4 avec la tourelle KF-51, ce qui signifie un Leopard 2A4 avec un canon de 130 mm » dans un train en partance pour Paris.
Rheinmetall a également révélé le 7 juin qu’elle présenterait le nouveau concept Panzerjaeger au salon. L’entreprise décrit ce concept comme étant « basé sur les dernières technologies [offrant] une capacité anti-blindage à longue portée, une connaissance de la situation et une supériorité de feu supérieures, ainsi qu’un système entièrement intégré capable d’incorporer plusieurs capteurs et effecteurs ».
En plus des véhicules
Plusieurs entreprises ont également présenté leurs systèmes nouveaux ou améliorés d’UAS, de CUAS et d’IA.
Parmi les sujets brûlants de DSEI l’an dernier, citons le lanceur Black Hornet de Teledyne Flir, des détails sur les CUAS et les efforts de la société technologique MARSS, ainsi que MSI Defence et Advanced Protection Systems dans le même domaine, et Controp Precision Technologies et Adarga qui ont fait la promotion de leurs travaux dans le domaine de l’intelligence artificielle. Certains de ces développements seront probablement présentés à Paris.
La défense aérienne est également au centre des préoccupations des pays qui suivent la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Saab Aerospace dévoilera une nouvelle version de son vénérable radar Giraffe, le Giraffe 1X Compact Radar Module.
Une nouvelle version du radar de défense aérienne Giraffe de Saab sera exposée au salon Eurosatory. (Photo : Saab)
Saab décrit le système comme « une solution tout-en-un [où] l’antenne se replie sur simple pression d’un bouton dans le module radar compact et léger. Son faible encombrement et son volume de recherche de 75 km le rendent adapté aux opérations d’urgence avec une infrastructure opérationnelle limitée », explique la société.