Cubic Defence UK : maîtriser un champ de bataille aujourd’hui dominé par l’intensité des feux grâce à un système d’entraînement intégré (I de II)

Cubic a été fondé il y a soixante-dix ans aux États-Unis et est connu pour ses innovations dans les secteurs du transport et de la défense. Fournisseur principal de l’OTAN en matière de systèmes d'entraînement en conditions réelles (LTS pour « Live Training Systems »), Cubic a « déployé plus d'un quart de million de systèmes sur plus de vingt-cinq terrains d'entraînement au combat (…) dans trente-trois pays » (1). Sa branche européenne, Cubic Defence UK, « fournit des solutions technologiques pour le commandement, le contrôle, la communication, l'informatique, le renseignement, la surveillance et la reconnaissance (C4ISR), ainsi que la formation ». Elle fournit également « un écosystème tactique de tir LVC [pour « Live, Virtual and Constructive »], améliorant les compétences en matière de tir à balles réelles grâce à des solutions d'entraînement immersives » (2). L'interview relatée ci-dessous se concentre sur ce dernier point et sur les défis de la formation dans le contexte de la transformation de la guerre dans le domaine terrestre et en particulier en ce qui concerne l'artillerie face au retour combiné de la guerre de haute intensité et de l’emploi inédit de technologies de rupture innovantes. Pour aborder ces questions : Andrew Gales et Martyn Armstrong.
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Démonstration d’entraînement LVC © www.cubic.com

Entretien avec Andrew Gales, directeur du développement commercial au niveau international, et Martyn Armstrong, vice-président des opérations britanniques/européennes et de la ligne de produits terrestres

— > Propos recueillis par Murielle Delaporte

Cubic a été fondé il y a soixante-dix ans aux États-Unis et est connu pour ses innovations dans les secteurs du transport et de la défense. Fournisseur principal de l’OTAN en matière de systèmes d’entraînement en conditions réelles (LTS pour « Live Training Systems »), Cubic a « déployé plus d’un quart de million de systèmes sur plus de vingt-cinq terrains d’entraînement au combat (…) dans trente-trois pays » (1). Sa branche européenne, Cubic Defence UK, « fournit des solutions technologiques pour le commandement, le contrôle, la communication, l’informatique, le renseignement, la surveillance et la reconnaissance (C4ISR), ainsi que la formation ». Elle fournit également « un écosystème tactique de tir LVC [pour « Live, Virtual and Constructive »], améliorant les compétences en matière de tir à balles réelles grâce à des solutions d’entraînement immersives » (2).

L’interview relatée ci-dessous se concentre sur ce dernier point et sur les défis de la formation dans le contexte de la transformation de la guerre dans le domaine terrestre et en particulier en ce qui concerne l’artillerie face au retour combiné de la guerre de haute intensité et de l’emploi inédit de technologies de rupture innovantes. Pour aborder ces questions : Andrew Gales et Martyn Armstrong, dont voici brièvement les parcours respectifs.

  • Andrew Gales est un ancien officier d’infanterie de l’armée britannique. Sa carrière militaire a débuté en 1997 en tant qu’officier de systèmes de communication et d’information, puis comme commandant et planificateur des opérations futures. En 2002, il obtint une maîtrise dans l’ingénierie des systèmes d’information à l’université de Cranfield. « Lorsque j’étais dans l’infanterie britannique comme combattant et en charge de l’instruction, j’ai beaucoup travaillé sur la simulation et les communications », explique-t-il. Fort de cette expérience, il a rejoint Cubic Defence au Royaume-Uni en 2012 en tant que responsable du développement de la formation et est devenu « Senior Business Development Global Director » en 2021.
  • Martyn Armstrong a également rejoint Cubic Defence UK en 2012 et est aujourd’hui vice-président pour les opérations britanniques et européennes et en charge de la ligne de produits terrestres. Au préalable, il a également passé la majeure partie de sa carrière dans l’artillerie au sein de l’armée britannique comme combattant et instructeur. Grâce à ces compétences en matière d’entraînement, il a mené « nombre d’expériences de simulation de haut niveau » : « Comme Andy », explique-t-il, « j’ai passé vingt-trois ans dans l’armée où, lorsque je ne participais pas moi-même à des opérations, je formais ceux qui devaient être déployés. C’est toute cette expérience en matière de formation, de simulation et d’opérations que j’ai pu apporter à Cubic lorsque j’ai quitté l’armée ; je dirige maintenant l’offre de produits terrestres pour Cubic à l’échelle mondiale ».

Compte tenu de votre expérience commune au sein de l’armée britannique, comment percevez-vous les changements majeurs ayant affecté l’utilisation de l’artillerie et la formation nécessaire pour la maîtriser depuis votre expérience de combat en Afghanistan et en Irak et par rapport au champ de bataille d’aujourd’hui en Ukraine ?

De la contre-insurrection à la guerre de haute intensité : la suprématie alliée remise en question et le retour de l’artillerie comme niveleur du champ de bataille

Pour Andrew Gales, les opérations en Irak et en Afghanistan ont entraîné une transition majeure en matière d’entraînement pour soutenir les opérations dans cette partie du monde : « lorsque nous sommes passés à la contre-insurrection, un changement délibéré s’est opéré en matière d’entraînement afin qu’il soit spécifique au théâtre. Nous nous sommes alors éloignés des manœuvres correspondant à la guerre de haute intensité ». La formation a dû s’adapter à un nouveau type de guerre, lequel revêtait les caractéristiques suivantes :
– un appui FOB (« Forward Operating Bases » ou bases d’opérations avancées) ;
– une suprématie aérienne totale et persistante ;
– la suprématie sur l’ensemble du spectre électronique ;
– la suprématie en matière d’ISR (« Intelligence, Surveillance and Reconnaissance »).

« Cependant», explique-t-il, « chaque fois que vous étiez sur le terrain, vous deviez toujours faire preuve de vigilance et surveiller d’où pouvait provenir le feu : votre principale menace venait d’un ennemi que, la plupart du temps, vous ne pouviez pas voir, se manifestant principalement par des engins explosifs improvisés lesquels étaient très meurtriers.

Ce que nous observons en Ukraine à l’heure actuelle est fondamentalement différent avec un retour aux principes caractéristiques de la manœuvre de haute intensité, à savoir l’absence de suprématie dans les domaines du renseignement et de l’artillerie et l’absence de supériorité aérienne.

Il s’agit de restaurer cette supériorité de manière limitée, afin d’obtenir un effet ciblé. Si les principes de la manœuvre de haute intensité restent les mêmes, ce qui a fondamentalement changé sont la technologie utilisée pour la mettre en œuvre, ainsi que la vitesse à laquelle ces décisions sont prises.

L’observation, l’information, la surveillance, la reconnaissance et le combat sont redevenus centraux.

Nous sommes ainsi passés d’une opération qui était devenue au fil des années assez limitée en Afghanistan et en Iraq à un théâtre dominé par la haute intensité et les effets constants que les tirs indirects produisent, en particulier dans un environnement où, tout au long de l’hiver, il est très difficile de se déplacer. Il est cependant toujours possible de déplacer vos points de tirs, que ceux-ci proviennent d’une arme antichar ou d’une pièce d’artillerie, la consommation de munitions devenant alors une considération prédominante et qui pèse lourdement sur l’infrastructure et les hommes », explique Martyn Armstrong.

« Si vous ajoutez à cela l’impact des technologies modernes, telles que les drones et les systèmes d’acquisition de cibles qui ont été utilisés de manière novatrice, vous assistez à une évolution radicale quant à la manière dont la guerre se déroule aujourd’hui par rapport à l’Afghanistan », ajoute-t-il.

Pour ce dernier, « le simple poids des munitions utilisées par l’artillerie et les systèmes de tir indirect en Ukraine en ce moment nous ramène (…) à la Seconde Guerre mondiale ou à n’importe quelle autre guerre à grande échelle, où l’artillerie est souvent l’élément qui permet de niveler le champ de bataille ». Là il n’y a plus lieu de « s’inquiéter de l’identification positive des cibles avant de tirer », en ce sens qu’il faut faire face à toute une ligne de front constituée de troupes ennemies. Et « si un mouvement est détecté au-delà de ces lignes, son origine est identifiée par des drones et la menace engagée par des tirs indirects, moyen le plus efficace de détruire ce type d’objectif ».

 

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(1) Citation issue et traduite de >>> https://www.cubic.com/cubic-awarded-us-army-contract-modernization-combat-training-center-ctc-supporting
(2) Sources : site internet de Cubic et LinkedIn

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