BITD : rupture technologique dans la sidérurgie

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Le dilemme d’accroître la production sidérurgique en respectant les objectifs de décarbonation

Pilier de la civilisation moderne, l’acier est utilisé au quotidien dans de nombreux secteurs (défense, infrastructures, transports, énergie, etc).

Le problème est que sa production est l’une des plus polluantes au monde : près de 2 milliards de tonnes produites chaque année, génèrent environ 8 à 10 % des émissions mondiales de CO₂. La majorité de l’acier est encore produite via des hauts fourneaux au charbon, très énergivores et émetteurs.

Face à une demande appelée à croître de 30 à 40 % d’ici 2050, l’enjeu est double : décarboner la production sans en freiner la compétitivité.

A noter que dans le contexte actuel de transition énergétique, de nombreux termes sont utilisés : acier vert, acier propre, zéro carbone, etc. Des termes qui ne sont pas toujours très précis. La World Steel Association recommande ainsi le terme « acier à faible teneur en carbone », considéré comme plus clair. Il désigne les aciers produits avec des technologies réduisant significativement les émissions de CO₂, comme :

• L’usage d’hydrogène vert ou bleu (ThyssenKrupp, Nippon Steel, Hesteel Group)
• Le captage et stockage du carbone (Emirates Steel, ArcelorMittal, Tata Steel)
• Le recours à l’énergie renouvelable (Nucor, Evraz, Green Steel)
• Les procédés de réduction directe électrochimique ou laser (ex. Limelight Steel)

Focus sur Limelight Steel : la révolution de l’acier laser bas-carbone

La start-up Limelight Steel, basée à Oakland en Californie, propose une alternative radicale : utiliser des diodes laser à semi-conducteurs pour chauffer le minerai de fer à plus de 1 600 °C et casser les liaisons fer-oxygène sans recourir au charbon, ni à l’hydrogène.

Le « Limelight Process » s’intercale entre l’extraction du minerai et la coulée. Il permet d’obtenir du fer fondu purifié, prêt à être transformé en acier, tout en évitant les émissions de CO₂ liées aux étapes de réduction thermique classique.

Ce processus, compatible avec des minerais de faible qualité et 100 % électrifiable (donc adaptable aux réseaux d’énergie renouvelable) pourrait ainsi permettre d’éviter 81% d’émissions de CO2 par rapport aux hauts fourneaux, d’économiser 46 % de consommation d’énergie et de viser jusqu’à 80% de rendement énergétique.

Soutenu par une subvention du ministère de l’Energie américain via l’agence ARPA-E (« Advanced Research Projects Agency – Energy ») d’un montant de 2,9 M$, le projet a été notamment sélectionné dans le cadre du programme ROSIE (« Revolutionizing Ore to Steel to Impact Emissions »), parmi treize projets innovants de décarbonation.

A ce stade, un prototype de laboratoire a été validé et une usine pilote d’une capacité de 100 tonnes par an est prévue dans les mois qui viennent, l’objectif commercial étant fixé à l’horizon 2030.

Ce positionnement s’inscrit dans une dynamique globale, soutenue par des politiques climatiques comme le CBAM européen (« Carbon Border Adjustment Mechanism »), qui favorisent les technologies bas-carbone et la relocalisation industrielle. Mais il va également dans le sens de la recherche de souveraineté des bases industrielles et technologiques de défense davantage sollicitées en cette période de réarmement mondial.

(Par Murielle Delaporte)

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